Respect du secret professionnel lors d’un contrôle fiscal

Le gérant et associé unique d’une entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) a réduit son capital social. Suite à une vérification de comptabilité, l’administration fiscale a estimé que cette réduction de capital avait mis fin au report d’imposition d’une plus-value d’apport d’actions réalisée 3 ans auparavant et a procédé aux rectifications d’impôt résultant pour le foyer fiscal du gérant.
Lors du contrôle fiscal, le vérificateur a pris connaissance dans les locaux de l’EURL d’un certain nombre de documents, parmi lesquels figurait une consultation juridique adressée par l’avocat du gérant au siège de la société mais à l’attention personnelle du gérant et revêtue de la mention « personnel et confidentiel ». Cette consultation détaillait les conséquences sur les revenus personnels du gérant de l’opération envisagée de réduction du capital de l’EURL notamment concernant la déchéance du sursis d’imposition d’une partie de la plus-value d’apport dont il avait bénéficié.
Cette correspondance entre le gérant et son avocat ayant fondé le redressement d’impôt en cause, le gérant a contesté sa régularité en vertu du principe du secret professionnel couvrant l’ensemble des correspondances échangées entre un avocat et son client, et notamment les consultations juridiques rédigées par l’avocat à son intention (l’article 66-5 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971).
En appel, les juges ont considéré la procédure d’imposition régulière car l’information protégée avait été révélée par le contribuable bénéficiaire du secret professionnel.
Et le Conseil d’État lui a donné raison. Si la confidentialité des correspondances entre l’avocat et son client ne s’impose qu’à l’avocat et non au client qui, n’étant pas tenu au secret professionnel, peut décider de lever ce secret, sans y être contraint, le fait que l’administration ait pris connaissance du contenu d’une correspondance échangée entre un contribuable et son avocat ne rend pas irrégulière la procédure d’imposition suivie à l’égard de ce contribuable dès lors que celui-ci a préalablement donné son accord.
En revanche, la révélation du contenu d’une correspondance échangée entre un contribuable et son avocat vicie la procédure d’imposition menée à l’encontre du contribuable et entraîne la décharge de l’imposition lorsque, à défaut de l’accord préalable du contribuable, le contenu de cette correspondance fonde tout ou partie de la rectification.
En l’espèce, le contribuable vérifié n’ayant pas donné son accord préalable à la révélation du contenu de la correspondance échangée avec son avocat, la procédure est irrégulière et le redressement d’impôt annulé.
Source : Conseil d’État, 12 décembre 2018, n° 414088
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